
En 2014, les championnats d'endurance ont opté pour une nouvelle réglementation technique drastique pour les LMP1, limitant la consommation de carburant. L’objectif étant qu’un concurrent ne puisse pas gagner en performance en consommant davantage de carburant que les autres. La conséquence a été immédiate, avec une réduction de 25 à 30 % de la consommation pour des performances équivalentes. Depuis le début de la saison 2015, les temps au tour ont sensiblement diminué, avec de meilleurs chronos en course à Silverstone et Spa-Francorchamps. Le même phénomène devrait se reproduire lors des 24 Heures du Mans, disputées les 13 et 14 juin, et certains records devraient être battus.
Un débitmètre est installé pour limiter la quantité totale de fuel utilisée pendant la course. Le système a été étudié pour limiter l’apport de carburant par tour plutôt que sur la course entière. Depuis le premier double tour d’horloge manceau en 1923, les courses d’endurance ont toujours été le laboratoire de technologies futures. C’est toujours vrai aujourd’hui, la nouvelle réglementation LMP1 poussant les ingénieurs à trouver de nouvelles solutions pour ‘repenser’ les prototypes LMP1 afin d’en obtenir une performance optimale. Les possibilités laissées par la réglementation et l’augmentation de la quantité d’énergie récupérée des systèmes ERS a pimenté les courses d’endurance, tout en relevant ce challenge.
Il n’y a pas que la consommation de carburant qui a eu un impact sur les performances des voitures. Les différentes approches techniques adoptées par les constructeurs ont aussi produit leurs effets, permettant d’assister à de formidables bagarres en piste. À Silverstone puis à Spa-Francorchamps, la vitesse affichée en ligne droite par la Porsche 919 Hybrid a impressionné tandis que la performance de l’Audi R18 e-tron quattro dans les virages a époustouflé la concurrence. Le résultat de ces challenges technologiques a abouti à de passionnants affrontements en courses, tenant le public en haleine. Cela a de plus démontré qu’une baisse de la consommation n’entraine pas nécessairement une baisse des performances.
Avant 2013, certains avaient quelques doutes sur l’équivalence des performances entre voitures à motorisation essence et celles à motorisation diesel. L’installation d’un débitmètre et un contrôle strict de l’allocation carburant ont balayé ces incertitudes.
Bernard Niclot, directeur Technique à la FIA, et Vincent Beaumesnil, directeur Sport à l’ACO, font en ce début de saison le bilan des évolutions introduites en 2014.
« La Commission Endurance et les promoteurs du WEC n’ont pas voulu donner un avantage technologique à un type de carburant plutôt qu’un autre, alors qu’ils cohabitent sur la piste », explique Bernard Niclot. « Nous devions par conséquent développer une équivalence de technologies qui ne soit pas une balance des performances. C’est la base de notre réglementation. Au terme des 24 Heures du Mans 2014, nous avons regardé la consommation des différents types de moteurs afin de vérifier les données avancées par les constructeurs. Nous avons fait de petits ajustements, jusqu'à trois décimales près, dans les facteurs de conversion entre l'essence et le diesel. Nous ferons la même chose en 2015, pour nous assurer qu’une technologie ne prenne pas le pas sur une autre. »
Cette façon de procéder est soutenue par le directeur Sport de l’ACO, Vincent Beaumesnil. « Quand nous avons mis en place la réglementation technique, nous avons érigé une méthode et une façon de faire des plus transparentes. Nous avons par exemple demandé aux constructeurs d’indiquer leur consommation de carburant, et tout le monde avait accès aux données de consommation des autres constructeurs. Tout ça, nous le surveillions. Cela supprime toutes possibilités de tricherie. Il n’y a que 2 % de marge d’erreur possible et d’importantes sanctions, jusqu’à l’exclusion, sont prévues au delà de cette marge. C’est donc dans l’intérêt de chacun de donner des données les plus justes. »
Le processus a quelque peu changé récemment, avec des données précises embarquées à bord, les constructeurs ne doivent désormais communiquer leur consommation d’essence qu’aux organisateurs.
« Mais il y a encore tout un domaine qui n’est pas pris en compte par les règles d’équivalence et qui concerne la performance des systèmes hybrides », poursuit Vincent Beaumesnil. « Nous cherchons à limiter les performances selon les différents niveaux d’hybridation (catégories ERS). Pour être honnête, nous espérions un temps au tour sur le circuit du Mans autour de 3 minutes et 35 secondes, et une vitesse maximale de 310 km/h dans la ligne droite de Mulsanne. Au final, la pole position a été obtenue en en 3’21’’ et les voitures ont dépassé les 340 km/h. Les prototypes des trois principaux constructeurs ont montré qu’ils pouvaient se disputer la victoire, à performances quasi équivalentes et avec des technologies très différentes. Cela signifie que nous travaillons dans la bonne direction et c’est une grande satisfaction. »
Si Niclot et Beaumesnil ont eu des moments de doute avant la saison 2014, ils se montrent désormais aussi fiers du résultat et de la fiabilité des systèmes hybrides que les constructeurs eux-mêmes. « Nous avons réussi à contourner les problèmes du débitmètre grâce à l’implication des constructeurs, qui nous ont toujours donné leur soutien inconditionnel. C’est important de le souligner. Depuis le début, ils ont salué ces choix technologiques et les contrôles de qualité garantissant l’équité sportive. En 2015, les débitmètres vont évoluer et profiteront de l’arrivée e de nouveaux logiciels permettant d’automatiser le système. »
Les voitures
AUDI R18 E-TRON QUATTRO
· Moteur V6 TDI 4.0L
· Puissance maxi 830 chevaux, moteur et système hybride combinés
· Vitesse maxi 340 km/h
· ERS Volant d’inertie à accumulation
· Catégorie ERS 4 MJ
· Réservoir 54,2 L (diesel)
· Poids 870 Kg
NISSAN GT-R LM NISMO (moteur avant, roues motrices avant)
· Moteur V6 3.0L double TURBO
· Puissance maxi -
· Vitesse maxi -
· ERS Volant d’inertie mécanique
· Catégorie ERS 2 MJ
· Réservoir 68,3 L (essence)
· Poids 870 Kg
PORSCHE 919 HYBRID
· Moteur V4 2.0L TURBO
· Puissance maxi Plus de 900 chevaux, moteur et système hybride combinés
· Vitesse maxi 330 km/h
· ERS Batterie Ion-Lithium
· Catégorie ERS 8 MJ
· Réservoir 68,3 L (essence)
· Poids 870 Kg
TOYOTA TS040 HYBRID
· Moteur V8 3.7L naturally aspirated
· Puissance maxi Plus de 1000 chevaux, moteur et système hybride combinés
· Vitesse maxi 340 km/h
· ERS Supercondensateurs
· Catégorie ERS 6 MJ
· Réservoir 68,3 L (essence)
· Poids 870 Kg
GLOSSAIRE
MGU-K : moteur électrique – cinétique
MGU-H : moteur électrique – chaleur
ERS : système de récupération d’énergie (se réfère à l’unité dans son ensemble)
MJ : Méga Joules, soit un million de joules
Joule : unité de mesure de l’énergie, sachant que 1000 joules correspondent à un kW (donc 1,34 chevaux sur une seconde), 8 MJ = 10,738 chevaux sur une seconde